« La porte de la conscience ne peut s’ouvrir que de l’intérieur. »

Cette phrase, citée par mon amie Micheline, se révèle une belle introduction à cet article sur les différents états de conscience et comment la méditation permet de faire l’expérience d’états de conscience supérieurs.

Il existe sept niveaux de conscience, chacun ayant son propre fonctionnement physiologique et sa propre qualité d’expérience. Voyons ce que recouvre chacun de ces niveaux de conscience et ce qu’ils apportent dans notre vie.

Mais, avant de plonger dans ces eaux fascinantes, demandons-nous ce qu’est la nature de la conscience.

Qu’est-ce que la Conscience ?

Dans son acception la plus simple, la conscience se définit comme le fait d’être conscient(e) de quelque chose (awareness ; to be aware en anglais).

C’est le fait de connaître (la connaissance) et ainsi la source de toute expérience qu’il s’agisse de pensées, d’émotions, de perceptions et de sensations (amenées à la conscience). Ceci pourrait se résumer à l’expression (adaptée de Descartes) « Je sais, donc je suis ».

C’est donc l’instance psychique où les expériences se produisent et sont connues.

Selon la philosophie du Vedānta, il y plusieurs niveaux de conscience qui, bien que distincts, font partie d’un tout : la conscience pure. À chaque niveau de conscience correspond une dimension de l’existence avec des expériences spécifiques. Par exemple, la réalité matérielle, avec les éléments du corps physique et de l’environnement, relève d’un certain niveau de conscience avec des caractéristiques précises, telles que les lois de la physique.

À un niveau plus subtil que le monde matériel, le mental est le siège de nos pensées, sentiments, émotions et désirs, tandis que l’intellect nous permet de traiter les informations, d’avoir des idées, d’explorer de nouveaux concepts et de pratiquer le discernement. L’ego, qui relève de cette instance psychique, est, quant à lui, ce que nous pensons être (toutes les histoires et les conditionnements que nous avons intégrés au long de notre vie et ce qui constitue notre personnalité).

Cette façon de concevoir la conscience suppose que nous accédons à une diversité de formes à travers nos perceptions et que sans conscience, il ne peut y avoir d’expérience. Pensons à nos cinq sens, comment percevrions-nous le monde si nous n’en étions pas dotés ? Toutefois, nos sens suffisent-ils à vivre l’éventail de l’existence humaine ?

Ceci implique que notre vie de tous les jours est limitée. Pensez au spectre de la lumière dont seule une partie est visible à l’œil nu.

Bonne nouvelle ! Tout comme il est possible de découvrir le monde sous un jour nouveau grâce à des instruments scientifiques, il est aussi possible d’explorer la partie immergée de l’iceberg et d’élargir le prisme de la conscience.

Attention, spoiler ! Comme vous allez le voir, mon outil de prédilection est la méditation.

Comment ouvrir le champ des possibles ?

Pour voir autrement, se libérer et s’épanouir au-delà des contraintes du mental et de l’ego (tout ce qui nous conditionne intérieurement), nous disposons d’un outil puissant qui existe depuis des millénaires : la méditation.

Grâce à la pratique régulière de la méditation, qui permet de faire l’expérience d’états de conscience supérieurs, notre conscience s’élargit.

L’expansion de la conscience n’engendre pas que des changements psychologiques (pensées, émotions, perceptions du monde), elle agit également au niveau physiologique et biologique (plasticité du cerveau, neurotransmetteurs, cellules). Les études scientifiques démontrent les multiples effets de la méditation sur la santé physique et mentale.

Toutes les expériences habituelles sont des événements spatio-temporels : tout ce que nous percevons se situe à un point précis de l’espace et du temps (c’est aussi vrai des pensées et des émotions). Or, avec la méditation, le méditant se détache des contraintes spatio-temporelles et touche ce qu’on appelle des états de conscience supérieurs (hors de l’espace-temps).

Lorsque nous méditons, nous glissons dans l’espace entre deux pensées, le champ de la conscience pure, non-locale, illimitée : entre une pensée et la suivante, il existe une infinité de possibilités.

Dans ce champ infini des possibles, la conscience revêt une signification spirituelle : il ne s’agit plus de connaissance de quelque chose en particulier, mais de conscience du tout, de potentiel pur, non-manifesté.

Alors que les expériences ordinaires changent constamment et que rien ne semble permanent, la méditation permet de faire l’expérience de l’unité, au-delà du corps mental et du corps physique.

Il va de soi que la réalité est différente selon différents états de conscience. Quand le corps et le mental ressentent du stress et de la fatigue et sont dépendants des souvenirs et des désirs, notre vie est une image déformée d’une réalité plus vaste. Quand, par la méditation, nous libérons le stress, la fatigue et les toxines, l’Esprit* brille pleinement dans nos vies. Le soleil brille sans cesse ; nous devons juste voir derrière les nuages (les vicissitudes).

*Dans de nombreuses traditions, l’Esprit (ou l’âme) est le principe de la vie incorporelle, l’essence éternelle de l’être.

L’état de veille, le rêve et le sommeil profond

Ces trois états de conscience, considérés comme ordinaires, sont ceux dont tout le monde fait l’expérience quotidienne. Toutefois, le Vedānta offre une perspective plus riche à propos de chacun d’eux.

Commençons par l’état de veille, qui est l’état dont nous faisons l’expérience en tant que réalité physique – le monde « réel » parce qu’il apparaît solide et structuré à nos sens, avec des règles et des limites établies.

Dans cette réalité, nos expériences sont localisées (dans l’espace-temps). C’est l’état le plus « vivant » et le plus « réel » pour la plupart d’entre nous, mais dans cet état relativement restreint, nous nous percevons comme séparés de tout et de tous.

Le rêve est l’état de conscience que nous expérimentons durant notre sommeil.

Dans cet état, la division sujet-objet est moins marquée. L’expérience est moins localisée et l’espace-temps est plus flexible que dans l’état de veille. Nous créons un monde interne qui semble réel au moment de rêver. Nous sommes absorbés dans notre création.

Nous faisons l’expérience du corps subtil (mental, intellect et ego) qui se projette en tant que corps physique.

Mais, au réveil, nous considérons que le rêve est une invention en nous rappelant certaines images et souvenirs.

Dans cette phase de sommeil, prédominante dans la seconde partie de la nuit, nous libérons le stress mental et émotionnel.

Le sommeil profond est un niveau d’être dans lequel nous ne ressentons aucune séparation entre soi-même et tout le reste. La conscience est toujours présente, mais il n’y a pas de conscience du « moi » (il n’y a aucune pensées).

Dans le sommeil profond, qui prédomine en début de nuit, le corps se repose et se régénère en libérant le stress physique. Nous consolidons nos souvenirs, notre corps se renouvelle et notre système immunitaire est renforcé.

Nous considérons le sommeil profond comme une expérience spirituelle, en contact avec l’âme, qui nous procure un sentiment de paix et de félicité.

Les états de conscience supérieurs

Chaque fois que nous méditons, nous faisons l’expérience d’un état de conscience appelé en sanskrit « Atma Darshan » (expérience directe de l’âme), aussi connue comme la conscience transcendantale.

Alors que les trois premiers niveaux de conscience sont localisés (dans l’espace-temps), Atma Darshan existe au-delà de l’espace-temps. Puisque toute expérience, pour être connue, doit se situer dans l’espace-temps, nous ne nous rendons compte de cet état que lorsque nous en ressortons.

La conscience transcendantale est un état d’être où la conscience est consciente d’être consciente (« Je suis conscient(e) que je suis conscient(e) »). Nous sommes dans le champ de toutes les possibilités, de la synchronicité, de la créativité, de la corrélation et de l’imprévisibilité (contrairement à la loi de la causalité).

Nos intentions deviennent très puissantes et nous sommes dans un état de connexion pure, d’amour, de compassion, de joie, de bonté et de paix. Nous y trouvons le penseur des pensées, le soi essentiel et éternel.

Avec la pratique de la méditation (avec les allers et retours entre domaine localisé et non-localisé), les aspects de la réalité non locale s’établissent progressivement dans la réalité locale, dans le sommeil, le rêve et l’état de veille.

À mesure que cela se produit, de nouveaux niveaux de conscience commencent à se déployer.

La conscience cosmique est l’expérience de la conscience témoin par laquelle nous observons sans juger.

Par exemple, durant la méditation, chaque fois que nous nous rendons compte que notre attention a été distraite (attirée vers autre chose – pensée, bruit ou sensation), nous revenons vers notre objet de concentration (mantra, respiration, etc.) sans juger. Les pensées qui surgissent ici et là ne sont que des phénomènes normaux à observer, comme les nuages qui vont et viennent dans un ciel bleu.

Dans cet état d’être, nous faisons l’expérience simultanée du local et du non-local ; nous agissons dans le monde matériel tout en nous regardant agir (pendant l’état de veille et le sommeil).

Bien que nous jouions de nombreux rôles (par exemple, celui de père ou de mère, d’employé ou d’employeur), nous savons que le vrai Soi ne se résume pas à ces rôles. Nous nous détachons lentement des rôles que nous jouons, en réalisant que nous sommes le joueur de ces rôles parmi tous les rôles possibles. Nous sommes le témoin silencieux de notre vie quotidienne. Nous jouons toujours ces rôles et nous faisons de notre mieux, mais nous ne sommes plus cantonnés aux bons et aux mauvais scénarios. Avec la méditation, nous sommes entraînés à cultiver la bienveillance et l’équanimité et à ne plus juger.

La conscience divine est l’expérience de la conscience témoin dans l’état de veille, le rêve et le sommeil, pas seulement au niveau de celui qui fait l’expérience, mais aussi dans tous les objets des expériences.

Au fur et à mesure que nous progressons, notre connaissance du domaine non local s’affine. En reconnaissant notre nature véritable, nous prenons progressivement conscience que le même témoin se trouve dans tout ce qui nous entoure, y compris le monde inanimé. Un profond sentiment de connexion avec le tout et avec chacun commence à se manifester (« Tat Tvam Asi » ou “Je suis Cela, Tu es Cela”).

La divinité que nous avons reconnue en nous-mêmes dans la conscience cosmique est maintenant reconnue en tout et en tous. Le cœur s’ouvre pleinement, et il y a un profond sentiment d’amour inconditionnel et de compassion.

La conscience de l’unité est l’état d’être dans lequel nous réalisons que la conscience témoin omniprésente n’est pas seulement dans tous les corps-esprits, mais qu’il s’agit en fait du même témoin.

L’univers entier est une manifestation de l’Un, dont nous faisons partie. Nous sommes l’Univers.

La mémoire de l’intégralité revient. Il n’y a qu’Un, sans séparation à aucun niveau.

Il ne s’agit plus seulement de connexion à tout ce qui est, mais de conscience que nous ne faisons qu’Un, d’éveil à notre véritable moi en tant qu’esprit indéfini et source de toute création (Esprit, Conscience universelle, Ahum Brahmasmi – Je suis la Totalité, l’Univers).

Nous fonctionnons toujours dans le monde localisé mais nous réalisons que nous avons une existence à la fois individuelle et universelle et que tout est Conscience sous différents déguisements. Le soi est pleinement éveillé au sein de son Vrai Soi. Il n’y a rien à faire, seulement à être. C’est l’illumination.

Conscience, miracles et liberté

Avec la pratique de la méditation (et les allers-retours entre domaine localisé et non-localisé), nous explorons toutes les couches de l’existence et les états de conscience supérieurs se déploient naturellement et spontanément.

L’expression sanskrite de cette réalisation est Ahum Brahmasmi : Je suis la Totalité. On y parvient par une pratique régulière de la méditation. La constance est donc très importante. Dans la méditation, nous glissons dans la conscience non-localisée (les quatre états supérieurs de conscience) et, par une pratique régulière de la méditation, nous l’intégrons dans notre vie.

Dans la conscience cosmique, nous faisons l’expérience de miracles, dans la conscience divine, nous créons des miracles et dans la conscience de l’unité, tout est miracle.

Grâce à la méditation, nous nous libérons de la cage que nous avons créée et nous commençons à faire entrer des possibilités infinies dans notre vie.

Au lieu d’être menés par nos désirs et souvenirs, nous sommes en mesure de faire des choix plus conscients et de déployer notre plus haut potentiel, ce qui nous permet d’éprouver plus de joie, de créativité, d’amour et de légèreté.

« Le lâcher-prise nous donne la liberté, et la liberté est la seule condition du bonheur. »

– Thích Nhất Hạnh